LETTRE A JULIE MICHEL, JEUNE AUXERROISE DISPARUE DANS L’ARIEGE EN JUILLET DERNIER.

Voici un texte que j’ai écrit et interprété à Brienon vendredi 27 septembre au cours d’une soirée de soutien à la famille et aux proches de Julie.

J’ai réinterprété ce texte devant les caméras d’Auxerre TV :pour voir la vidéo, cliquer ici

Il était une fois une petite poule blanche, toute blanche, tellement blanche qu’on aurait dit que ses plumes avaient des reflets d’eau. Elle était coiffée d’une huppe toute noire et quand on la croisait, on disait : « Tiens, voilà la petite poule blanche aux cheveux noirs ! ».

Elle vivait à la campagne. Enfin… à la campagne… si on considère qu’en dehors des grandes fermes, c’est la campagne partout.

Un jour, elle eut envie de voyager, de prendre de la hauteur et de voir une montagne, une grande montagne, une vraie, avec des sommets, des pics, des cascades. Elle en avait assez des collines de Bourgogne, de ses plaines et de ses bois détrempés. On finissait toujours par se cogner dans quelqu’un de connaissance et la petite poule blanche à la huppe noire rêvait de changement, de solitude et de liberté. Elle salua donc ses parents, sa sœur, ses amis et un lundi du mois de juillet, elle prit la route des Pyrénées. Ainsi, elle pourrait passer l’été à crapahuter sans craindre le froid et serait de retour avant les premières neiges. Elle avait bien entendu parler des loups et des ours des montagnes, mais comme la petite chèvre de M Seguin, déjà ivre de vent et du parfum des aspérules, elle n’y pensa plus aussitôt l’Ariège en vue. Elle se disait qu’au village, à Auxerre, on serait bien surpris de son audace, de son courage à se lancer toute seule à l’assaut d’une chaîne de montagnes, comme une brave petite poule blanche qu’elle était. Elle disparut au détour d’un chemin.

Au bout de quelques semaines, on commença à s’inquiéter de son silence. Chez elle, l’inquiétude vira à l’angoisse et à l’épouvante. La petite poule blanche n’avait pas donné signe de vie depuis trop longtemps. On finit par s’alarmer et on se lança à sa recherche. Rien ! On découvrit ses affaires près du col du Port de l’Hers, mais de la petite poule blanche à la huppe noire, on ne trouva nulle trace. L’oiseau s’était envolé !

La nouvelle se répandit comme une traînée de poudre jusqu’au village. Il est bon parfois d’être d’un village. Les habitants des fermes de Bourgogne se réunirent et décidèrent de chanter ensemble un hymne au retour de la petite poule blanche à la huppe noire.

Ils se disaient que leurs chants monteraient tellement haut, encore plus haut que le haut du pic le plus haut que la petite poule blanche à la huppe noire l’entendrait et qu’elle reviendrait. Ils se disaient que la somme de toute leurs énergies déplacerait la montagne, que l’amour de toute la Bourgogne ainsi conjugué irait jusqu’au cœur de la pierre qui elle-même se mettrait à chanter le retour de la petite poule blanche à la huppe noire.

Gadine, à Julie, 19 septembre 2013

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